Cession de la résidence principale : l'exonération d'impôt n'est pas systématique

Notion de résidence principale : résidence habituelle et effective

En pratique, la nature de la résidence - principale ou secondaire - est généralement facile à identifier, en raison du lieu de travail ou de l'école des enfants, par exemple. Des hésitations peuvent toutefois se présenter pour les personnes qui disposent de plusieurs résidences et qui les occupent chacune de manière régulière.

L'administration fiscale définit la résidence principale comme l'immeuble ou la partie d'immeuble constituant la résidence habituelle et effective du propriétaire. Il s'agit donc du logement où le contribuable réside pendant la majeure partie de l'année et cette résidence doit pouvoir être justifiée par des actes concrets. En cas de contentieux, ces deux critères sont appréciés au cas par cas par l'administration fiscale, et lorsqu'un doute subsiste, le contribuable est tenu de prouver par tous moyens l'effectivité de la résidence (avantages fiscaux liés à l'habitation principale en matière d'impôt sur le revenu ou en matière de taxe d'habitation, par exemple).

Précision

Dans le cas où le contribuable réside 6 mois de l'année dans un endroit et 6 mois dans un autre, la résidence principale est celle pour laquelle l'intéressé bénéficie des abattements en matière de taxe d'habitation.

La règle générale est néanmoins adaptée pour tenir compte de situations particulières. Ainsi, lorsqu'un des époux est titulaire d'un logement de fonction, ce logement constitue, en principe, sa résidence principale. Cependant, lorsque le conjoint et les enfants du titulaire du logement de fonction résident effectivement et en permanence dans une autre habitation, cette dernière peut être considérée comme constituant l'habitation principale du foyer.

Autre situation : lorsque l'immeuble ou la partie d'immeuble cédé est totalement affecté à usage d'habitation, mais constitue le domicile commercial d'une entreprise, il est admis que l'exonération puisse s'appliquer à la totalité de la plus-value. En revanche, lorsque l'immeuble ou la partie d'immeuble cédé est pour partie affectée à usage d'habitation et pour partie à usage professionnel, seule la fraction de la plus-value afférente à la cession de la partie privative qui constitue la résidence principale du cédant peut bénéficier de l'exonération.

Dans le même ordre d'idée, lorsque le contribuable occupe un logement dans un immeuble collectif dont il est propriétaire, seul le logement effectivement occupé doit être considéré comme résidence principale.

Dans le cas d'un logement dont le droit de propriété est démembré, dès lors que le logement constitue la résidence principale du seul usufruitier, seule la quote-part de plus-value correspondant aux droits de l'usufruitier est susceptible de bénéficier de l'exonération. Si le logement constitue la résidence principale de l'usufruitier et du nu-propriétaire, la plus-value peut, en principe, bénéficier de l'exonération. Dans le cas où la jouissance des locaux est répartie entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, l'exonération est alors limitée aux locaux effectivement utilisés à titre de résidence principale.

Pour ceux qui vivent sur l'eau

Une péniche constitue juridiquement un bien meuble. Elle n'ouvre donc pas droit à exonération. Il est toutefois admis que cette exonération s'applique aux cessions de bateaux ou péniches lorsque les conditions suivantes sont simultanément remplies :

  • le bateau ou la péniche ne doit pas être destiné à la navigation,
  • il est soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties,
  • il est effectivement utilisé au jour de la cession en un point fixe à usage d'habitation principale de son propriétaire.

Résidence principale au jour de la cession

L'autre condition pour bénéficier de l'exonération est que le logement doit effectivement être la résidence principale du cédant au jour de la cession. Cela peut sembler couler de source, mais les aléas de la vie ou certaines situations familiales peuvent remettre en cause cette exigence du droit fiscal. Heureusement, cette condition est appréciée avec souplesse.

Ainsi, lorsque le logement a été occupé comme résidence principale jusqu'à sa mise en vente, mais se trouve vacant à la date effective de la vente, l'exonération s'applique si la vente intervient dans un "délai normal". L'appréciation du caractère normal du délai est une question de fait qui est fonction de l'ensemble des circonstances de l'opération : conditions locales du marché immobilier, prix demandé, caractéristiques particulières du bien cédé et diligences du vendeur (annonces dans la presse, démarches auprès d'agences immobilières, etc.) Aussi, est-il prudent pour le cédant de conserver les annonces qu'il a fait paraître et de garder trace des démarches effectuées auprès des agences immobilières. L'administration fiscale admet qu'un délai de vente maximal d'un an est normal. De son côté, le Conseil d'État admet au vu de circonstances particulières un délai plus long - 22 mois, voire 28 mois - sans remise en cause de l'exonération (CE 29.12.1999 n° 135065, CE 06.10.2010 n° 308051, CE 07.05.2014 n° 356328).

Cependant, attention, le fait de donner en location son ancienne résidence principale dans l'attente de la vente, ou de la mettre à disposition d'un membre de la famille ou d'un tiers pendant cette période, fait perdre le bénéfice de l'exonération.

Par ailleurs, en cas de divorce ou de séparation, la condition tenant à l'occupation du logement à titre d'habitation principale au jour de la cession n'est pas toujours satisfaite, notamment lorsqu'un des conjoints a été contraint de quitter ce logement. Cependant, ce dernier peut bénéficier de l'exonération si les conditions suivantes sont réunies :

  • le logement constituait la résidence principale du couple au moment du divorce ou de la séparation,
  • il a été occupé par l'ex-conjoint jusqu'à sa mise en vente,
  • la cession intervient dans les délais normaux de vente (notion vue précédemment).

Cette mesure de tempérament est applicable aux partenaires qui rompent un PACS et aux concubins qui se séparent (concubinage notoire), sous les mêmes conditions.

La doctrine fiscale se montre souple également dans le cas où la cession d'un immeuble en cours de construction est réalisée à la suite d'une mutation professionnelle ou pour cause d'invalidité de 2e ou 3e catégorie ou de décès du cédant ou de son conjoint. Trois conditions doivent toutefois être réunies :

  • apporter la preuve que l'immeuble cédé était destiné à l'habitation principale,
  • établir que la cession intervient bien à la suite de la mutation professionnelle, de l'invalidité ou du décès,
  • justifier ne pas être propriétaire du logement occupé durant la construction de la future habitation.

Une mesure de tempérament équivalente s'applique en cas de séparation des conjoints durant la période de construction (divorce, rupture de PACS, fin de concubinage).

Rappelons que tous ces éléments qui permettent de bénéficier de l'exonération prévue par l'article 150 U, II-1° du Code général des impôts, sont, lorsqu'il y a contentieux, appréciés au cas par cas l'administration fiscale, sous le contrôle du juge de l'impôt.

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