Retraite progressive : mode d'emploi
Qui est concerné ?
Tous les salariés du secteur privé, y compris les salariés agricoles, peuvent demander à bénéficier de la retraite progressive. Font notamment exception à ce principe général : les cadres soumis à une convention de forfait en jours sur l'année, les salariés dont le contrat de travail est intermittent, ou encore les VRP, sauf dans les cas exceptionnels où ils sont soumis à un horaire précis. La seule contrainte pour le salarié est d'obtenir l'accord de son employeur.
Les agents de la fonction publique peuvent également en bénéficier.
Le dispositif est aussi ouvert aux indépendants : artisans, commerçants et exploitants agricoles. En revanche, les professionnels libéraux n'y ont pas accès, du moins lorsqu'ils exercent leur activité libérale au moment de la demande. En effet, si l'assuré qui demande une retraite progressive a été, au cours de sa carrière professionnelle, affilié à la CNAVPL, la caisse pilotant le régime de base des professions libérales, ou à la CNBF, la caisse de retraite des avocats, même pour une courte période, celle-ci sera néanmoins prise en compte pour déterminer la durée d'assurance requise pour bénéficier de la retraite progressive.
Bon à savoir |
La retraite progressive est présentée lors d'un entretien d'information sur la retraite que tout assuré âgé d'au moins 45 ans peut demander à l'un des organismes de retraite dont il relève. L'entretien a pour objet :
- de faire un point d'étape sur les droits déjà constitués dans les régimes de retraite obligatoires et d'examiner les perspectives d’évolution de ces droits, compte tenu des choix et des aléas de carrière éventuels (périodes d'études ou de formation, arrêt maladie, maternité, chômage, temps partiel...), |
Quelles conditions remplir ?
L'accès à la retraite progressive nécessite de réunir trois conditions.
En premier lieu, l'assuré doit avoir atteint l'âge légal de départ à la retraite diminué de 2 ans, et au moins 60 ans. Pour rappel, depuis la loi Woerth de 2010 sur les retraites, l'âge légal de départ à la retraite, fixé à 60 ans pour les assurés nés avant le 1er juillet 1951, est augmenté progressivement pour atteindre 62 ans pour les assurés nés à partir de 1957.
Deuxièmement, l'assuré doit justifier de 150 trimestres d'assurances ou de périodes reconnues équivalentes dans un ou plusieurs des régimes d'assurance vieillesse de base obligatoires, y compris les régimes spéciaux (EDF, SNCF, RATP, Opéra de Paris, Comédie Française, etc.).
Enfin, l'entrée dans le dispositif entraîne obligatoirement une réduction du temps de travail. Pour un salarié, l'activité à temps partiel ne peut être ni inférieure à 40 % ni supérieure à 80 % de la durée légale ou conventionnelle applicable dans l'entreprise. Pour un indépendant, la notion de temps partiel est déterminée sur la base du revenu professionnel : celui-ci doit être réduit d'au moins 20 % par rapport à la moyenne des revenus des cinq années précédant la demande.
Quel montant ?
L'entrée dans le dispositif est précédée de la liquidation provisoire de l'ensemble des pensions des régimes de base. Les droits sont calculés à l'instant T, en prenant en compte notamment le nombre de trimestres acquis par l'assuré et les éventuelles majorations. Les droits de certains régimes complémentaires sont simultanément calculés (principalement l'ARRCO-AGIRC pour les salariés, l'IRCANTEC pour les agents non titulaires de la fonction publique). Intervient ensuite le calcul de la retraite progressive dont le montant est inversement proportionnel à la quotité de travail à temps partiel.
Pour le salarié, le calcul est simple. Par exemple, pour une durée de travail à temps partiel de 25 heures hebdomadaires et une durée légale applicable à l’entreprise de 35 heures hebdomadaires :
- la quotité de travail est de : 25/35 x 100 = 71,4285 arrondi à l’entier le plus proche, soit 71 %,
- et le pourcentage de fractionnement à appliquer au montant entier de la retraite est de : 100 – 71 = 29 %.
Pour un indépendant, le calcul est opéré en deux temps :
- pendant la première année et le premier semestre de l'année suivante, la fraction de pension de vieillesse est fixée à titre provisionnel au taux de 50 % ;
- à compter du 1er juillet de la deuxième année et chaque 1er juillet, il est éventuellement procédé à la révision de la fraction de pension en fonction du rapport entre le revenu de l'année précédente et la moyenne des revenus des cinq années précédant la demande. La caisse procède alors, selon les cas, au remboursement à l'assuré des sommes restant dues, ou recouvre les sommes trop perçues par l'assuré. Si le revenu tiré de l'activité professionnelle n'est pas réduit d'au moins 20 %, l'assuré encourt la suppression définitive du service de la pension de retraite progressive.
Quand la retraite progressive prend-elle fin ?
Il n'y a pas de limite à la phase de retraite progressive, tant que l'assuré, et le cas échéant son employeur, y consentent et que les conditions de versement sont respectées.
En pratique, le montant de la fraction de retraite est servi pendant un 1 an à compter de la date d’effet de la retraite progressive, même en cas de modification de la durée de l’activité à temps partiel au cours de cette période. En effet, toute modification de la fraction de retraite prend effet au 1er jour du mois suivant la fin de chaque période de 1 an. A l’issue de chacune de ces périodes de 1 an, l’assuré doit justifier de sa durée de travail à temps partiel.
Le versement de la fraction de pension est interrompu, sans possibilité de renouvellement, lorsque l’assuré :
- ne répond pas au questionnaire périodique de contrôle de la durée de l’activité à temps partiel,
- modifie la durée de son activité à temps partiel de telle sorte que celle-ci se retrouve en dehors des seuils réglementaires,
- reprend une activité à temps plein ou exerce une autre activité à temps partiel en sus de celle ouvrant droit au service de la fraction de pension,
- cesse définitivement son activité : il bénéficie alors, à sa demande, de la pension complète.
Quels effets sur la retraite définitive ?
Contrairement au cumul emploi-retraite, qui impose la liquidation de l'ensemble des pensions, la retraite progressive permet à l'assuré d'acquérir des droits supplémentaires à la retraite.
Ainsi, par exemple, le salarié affilié au régime général continue :
- d'engranger des trimestres au régime de base s'il ne disposait pas, au moment de la demande de liquidation provisoire, de la durée d'assurance requise pour une retraite à taux plein (par exemple, 165 trimestres pour les assurés nés en 1953 et 1954),
- et d'accumuler des points de retraite complémentaire, quelle que soit d'ailleurs sa situation au regard du régime de base.
Cependant, rappelons que les cotisations sociales pendant la retraite progressive sont calculées sur le salaire de l'activité à temps partiel. Par conséquent, les droits à la retraite acquis durant cette période sont calculés sur une base plus faible que celle correspondant à une activité à temps plein. Un salarié peut néanmoins limiter la "casse" et demander que les cotisations soient calculées sur la base d'un temps plein. La possibilité vaut pour le régime de base et les régimes complémentaires. Elle nécessite toutefois l'accord de l'employeur, lequel peut décider - cas rarissime - de prendre en charge le surplus de cotisations.
Bon à savoir |
Selon l'intérêt de l'assuré, le dispositif de la retraite progressive doit être comparé au système de la surcote. Celui-ci est automatiquement appliqué lorsque l'intéressé prolonge son activité professionnelle - on peut supposer à temps plein - alors même qu'il même qu'il réunit les conditions d'un départ à la retraite à taux plein. La majoration de pension est de 1,25 % par trimestre supplémentaire cotisé. |
Au moment du départ définitif à la retraite, la pension est recalculée en intégrant les droits acquis au titre des cotisations versées pendant la période de retraite progressive. Le montant de la retraite définitive ne peut être inférieur au montant entier ayant servi de base au calcul de la retraite progressive.
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