Se porter caution pour un prêt
Même si la formule reste exceptionnelle, le cautionnement d'un personne physique pour garantir le paiement d'un prêt peut être accepté par la banque ou l'établissement de crédit. Cependant, se porter caution pour un membre de sa famille ou un ami peut être lourd de conséquences en cas de défaillance de celui-ci. La caution dispose néanmoins de recours lorsqu'elle est sollicitée.
Lors de la conclusion d'un contrat de prêt, l'établissement de crédit (banque ou société spécialisée) exige généralement une garantie de la part de l'emprunteur. Le choix de cette garantie se fait au cas par cas en fonction des pratiques habituelles de l'établissement financier mais aussi en fonction de l'appréciation du risque par le conseiller en agence. C'est même bien souvent un élément de la négociation commerciale lorsqu'elle porte sur un prêt immobilier.
Actuellement, les banques ont principalement recours à une société de caution, avec laquelle elles ont passé un contrat. La solution a l'avantage d'être moins lourde sur le plan des formalités et moins onéreuse que l'hypothèque qui demande l'intervention d'un notaire au moment de sa mise en place et lors de la levée. Le nantissement (ou gage) sur un placement financier (par exemple, un compte-titres ou un contrat d'assurance-vie) est une solution marginale.
Le cautionnement d'une personne physique peut constituer une solution alternative même si en pratique elle est aussi peu usitée. Elle est plutôt demandée pour de petites opérations et souvent à titre de garantie complémentaire. La personne qui se porte caution peut être un membre de la famille ou une personne proche de l'emprunteur. Elle aura la lourde responsabilité d'exécuter les obligations de l'emprunteur lorsque celui-ci manque à l'appel. Son engagement n'est donc pas sans risque.
Deux types de cautionnement
Il existe deux types de cautionnement : le cautionnement simple et le cautionnement personnel et solidaire qui constitue la formule la plus souvent demandée par la banque.
Le cautionnement simple
En cas de défaillance de l'emprunteur, la personne qui se porte caution peut demander au créancier :
- diriger ses poursuites en priorité contre le débiteur,
- saisir et faire vendre les biens de celui-ci, avant d'être elle-même poursuivie.
Ce droit accordé ici à la caution est appelé en langage juridique, "bénéfice de la discussion". Le principe est posé par l'article 2298 du Code civil.
En cas de pluralité de cautions, la caution qui est sollicitée en premier peut demander que les poursuites soient dirigées vers les différentes cautions au prorata de leur "part" dans la dette, ce qu'on appelle le "bénéfice de division" (article 2303 du Code civil).
Le cautionnement personnel et solidaire
Dans la situation d'un cautionnement solidaire, la caution, lorsqu'elle est sollicitée, est considérée véritablement comme étant "emprunteur à la place de l'emprunteur".
Du fait même qu'elle est solidaire, la caution renonce au bénéfice de discussion et de division évoqués ci-dessus. Le caractère personnel de la caution signifie que son engagement porte sur tous ses biens : logement, revenus, autres biens personnels, etc.
Bon à savoir |
Le créancier peut accepter un cautionnement solidaire portant sur un seul bien immobilier. On parle alors de cautionnement hypothécaire . La formule évite ainsi d'engager tous les biens de la caution. Si la dette est supérieure au montant de la vente du bien immobilier en question, la caution n'aura pas à s'acquitter de la différence. |
Durée de vie du cautionnement
L'engagement de caution est conclu pour une durée qui doit être précisée dans le contrat de cautionnement. Il court généralement pendant la durée du prêt et jusqu'au remboursement total des sommes dues. Il est irrévocable durant cette période.
Le cautionnement peut également être donné pour une durée indéterminée. Dans ce cas, la garantie de la caution porte sur toutes les dettes nées à compter de la date d'effet du contrat de cautionnement. Mais nul ne pouvant s'engager à perpétuité, la caution dispose tout de même de la faculté de résilier le contrat. Dans ce cas, la caution sera tenue uniquement des dettes éventuelles nées avant la résiliation qui met fin au contrat de cautionnement. Rappelons que pour un cautionnement à durée indéterminée, l'établissement prêteur est tenu, au moment de la prise d'engagement et chaque année suivante, de rappeler à la personne qui se porte caution la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée (voir plus loin l'obligation d'information annuelle envers la caution).
Formalisme du cautionnement
Le contrat de cautionnement doit être écrit et signé par toutes les parties (créancier, débiteur principal et caution) ou au moins par le créancier et la caution.
Le Code de la consommation impose à la personne physique qui se porte caution de faire précéder sa signature d'une mention obligatoirement manuscrite et donc le contenu doit être scrupuleusement respecté. Dans le cas d'un cautionnement simple, la mention est la suivante (article L.331-1 du Code de la consommation) : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même."
Lorsque le cautionnement est solidaire, la mention doit être complétée de la manière suivante (L.331-2 du code de la consommation) : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X.... "
Les tribunaux font une application très stricte de ces dispositions. Tout manquement, toute formulation qui ne serait pas conforme au texte prévu par le Code, tout mélange des deux formulations entraînerait la nullité du contrat de cautionnement. Précisons toutefois que dans le cas d'un cautionnement solidaire, l'absence de la deuxième mention ne remet pas en cause l'engagement, celui-ci demeurant valable en tant que cautionnement simple.
Au regard du prêt proprement dit, la caution bénéficie des même droits que l'emprunteur (délai de réflexion, délai de rétractation, informations obligatoires liées au contrat de prêt, etc.).
L'établissement prêteur est tenu d'informer la caution personne physique chaque année avant le 31 mars du montant de toutes les sommes dues par le débiteur au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de l'engagement (article L.333-2 du Code de la consommation).
Effets sur le patrimoine de la caution
La caution est mariée
Même si la caution est mariée sous le régime de la communauté et lorsque son conjoint n'est pas intervenu au contrat, seuls ses biens propres et ses revenus pourront être saisis. Mais, en pratique, les établissements de crédit exigent la signature des deux époux, signature qui engage donc les biens communs.
Lorsque, dans un ménage, l'un des époux se porte caution de l'autre, les effets du cautionnement ne s'éteignent pas automatiquement du fait du divorce. Il faut demander, au créancier, la résiliation du contrat de cautionnement.
La caution décède
Le cautionnement d'une dette déterminée née avant le décès de la caution tombe dans sa succession. Par conséquent, lorsque la dette devient exigible après le décès de la caution, les héritiers sont tenus de la régler s'ils ont accepté la succession.
A l'inverse, le cautionnement d'une dette d'une durée indéterminée au moment de la signature de l'engagement prend fin au décès de la caution. Celle-ci n'est pas en principe transmise aux héritiers. Par conséquent, les héritiers ne sont pas tenus de garantir les dettes nées après le décès de la caution, l'obligation de couverture ayant cessé.
Sollicitation de la caution et les recours possibles
Sollicitation de la caution
L'établissement prêteur doit informer la caution dès le premier incident de paiement non régularisé. En pratique, la caution est donc sollicitée dans les deux mois qui suivent le premier incident si aucune régularisation n'est intervenue.
Les recours de la caution
Dès lors qu'elle est sollicitée, la caution dispose ensuite de moyens d'actions pour se défendre.
Ainsi, dès qu'elle est poursuivie par le créancier, la caution peut :
- obtenir elle-même des délais de grâce en justice (24 mois au maximum) si elle ne peut, pour des raisons économiques, remplir son engagement (article 1343-5 du Code civil),
- ou encore invoquer la faute du créancier négligent, par exemple lorsque celui-ci laisse s'éteindre d'autres garanties de la dette (ex : non renouvellement dans les délais d'une inscription hypothécaire).
Avant même d'avoir payé, la caution peut également agir contre le débiteur principal, notamment lorsqu'elle est elle-même poursuivie en justice pour le paiement de la dette ou encore lorsque le débiteur a fait faillite ou est en déconfiture (article 2309 du Code civil).
Bon à savoir |
Lorsque le débiteur a fait faillite ou est en déconfiture, le redressement judiciaire ou la liquidation des biens suspend toute poursuite individuelle. La caution ne peut que déclarer sa créance, mais ne peut poursuivre le débiteur. |
Enfin, quelle que soit la nature du cautionnement (simple ou solidaire), la caution est toujours en droit :
- de se retourner contre le débiteur après avoir payé,
- de lui réclamer le principal de la dette, les intérêts ainsi que le remboursement de frais éventuels,
- et de lui demander des dommages-intérêts, en cas de préjudice.
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